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Engrais animal

Tant qu'il n'y a que quelques animaux vivant dans leur biotope naturel, leurs excréments sont un engrais importants pour le sol. Cependant, la grande demande de viande, de lait et d'oeufs a conditionné le fait qu'on élève un nombre croissant d'animaux sur des surfaces toujours plus petites. A ce faire, les sols ne peuvent plus absorber les quantités énormes d'excréments animaux. 

Ainsi, les excréments des animaux s'évaporent dans l'air (ammoniac) et s'accumulent dans les nappes phréatiques (nitrates).  Dans les rivières et les lacs, les poissons meurent par ce surplus d'engrais. Celui-ci est à la base d'une explosion de la croissance d'algues, qui de son côté consomme l'ensemble du stock d'oxygène disponible dans les eaux, ce qui mène au suffoquement de toute vie restante. Dans une grande partie du golf du Méxique, la vie a dépéri faute à cette pollution désastreuse. 
Aux Etats-Unis, la pollution de l'environnement par l'industrie de la viande est 130 plus importante que celle causée par les hommes.

A ce jour, rares sont les légumes cultivés sans engrais animal. En effet, les matières fécales des animaux dits d’abattoir, le fumier et le lisier sont déversés sur la plupart des sols cultivés. Il faut savoir que, dans les fabriques d’animaux, le sol n’est pas en contact avec la terre et que dans ces stations d’élevage l’élimination des excréments des nombreux animaux qui y sont détenus constitue un véritable problème. Par contre, les excréments des rares cochons élevés en liberté, circulant dans des espaces en plein air, ne sont pas un problème majeur.

Bien qu’environ la moitié de la viande consommée en Suisse est de la viande de porc et que la Suisse produise la presque la totalité des besoins du pays de cette viande, il est rare de voir des cochons en liberté en plein air. Il est donc nécessaire d’éliminer leurs excréments d’une manière ou d’une autre. Le plus simple est de les répandre comme engrais dans les champs cultivés. Lorsqu’on fait ses achats dans un supermarché, il faut savoir que les légumes achetés ont été produits avec des engrais d’origine animale. Hélas, la production bio n’offre pas non plus d’alternative. C’est ainsi que les unions de producteurs bio acceptent encore aujourd’hui l’utilisation de matières fécales animales pour fertiliser leurs champs et de farines dont la composition inclut des cornes et des résidus de poils et de plumes de leurs animaux abattus. La plupart des fédérations à l’intérieur de l’Union Européenne ont interdit, à cause de l’ESB (encéphalite spongiforme bovine – maladie dite de la vache folle), l’usage de farines contenant du sang et des os d’animaux. En Suisse, ces produits d’abattoir ont encore été utilisés un certain temps pour la culture des légumes. 
L’association bio suisse Le Bourgeon, stipulait par une directive du 1er janvier 2001, à propos de la fertilisation des sols (annexe 1, para.2), que sont admis :

« Les produits et sous-produits d’origine animale tels que les farines contenant du sang, de la corne, des os, des poils et des plumes. »

Depuis, en raison de l’ESB, une nouvelle réglementation (directive du 1er janvier 2004) interdisant les farines animales (sang, os, etc.) a été édictée [1]. Il est bien entendu que la question des champs fertilisés avec des matières fécales des animaux d’abattoir dépend aussi du choix des mots. Même dans les exigences bio, les bovins sont encore déclarés comme principale source d’engrais. 
Les personnes végétariennes et veganes sont opposées à l’emploi d’engrais animaux. Toutefois, rares sont les paysans qui ont reconnu les avantages des engrais essentiellement végétaux et c’est pourquoi de tels produits sont actuellement encore si peu disponibles sur le marché [2].

Problèmes liés aux engrais animaux

Il existe plusieurs catégories de problèmes soulevés par l’emploi d’engrais animaux:

Surplus d’engrais

La quantité d’excréments en jeu dans la production de viande, de lait et d’œufs est supérieure à ce que les sols peuvent supporter. Une quantité limitée d’engrais animal lorsque les animaux pâturent dans les prés n’entraîne pas d’excès d’engrais. Toutefois, comme actuellement les animaux, surtout les cochons et les poules, sont détenus en permanence à l’intérieur de fabriques, leurs excréments et urine doivent d’une manière ou d’une autre être éliminés. Cela a pour conséquence que de nombreuses régions en sont saturées et que ces matières sont déversées directement dans les nappes phréatiques. C’est notamment le cas au lac de Sempach, qui ne doit qu’à un système d’aération artificiel de ne pas être étouffé par les matières fécales provenant des élevages de cochons nombreux dans la région. L’excès d’engrais influence aussi négativement les cultures végétales. C’est également vrai pour la diversité des espèces.

Antibiotiques

C’est un fait établi que par suite d’une utilisation élevée d’antibiotiques, les bactéries deviennent toujours plus résistantes, d’où la nécessité d’en réduire l’usage. Bien que ces médicaments soient prohibés en tant que moyen d’améliorer les performances et donc la rentabilité, la moitié de la production d’antibiotiques est encore destinée aux fabriques d’animaux[3], l’autre moitié allant aux soins médicaux, hôpitaux, etc. 
Un animal traité aux antibiotiques ne peut pas être abattu immédiatement après la dernière prise d’antibiotiques, parce que sa viande en contiendrait une quantité trop élevée. Toutefois, trop peu d’attention a été donnée aux effets des antibiotiques administrés aux animaux au cours de la période du traitement. En quelques heures, une grande partie de la totalité de ces médicaments est évacuée dans les excréments et l’urine pour ensuite pénétrer dans l’environnement. Le lac de Sempach ci-dessus mentionné contient un degré élevé de résidus d’antibiotiques[4]. Cette concentration croissante d’antibiotiques dans l’environnement présente un danger potentiel qui n’a pas encore été évalué avec précision. Il pourrait signifier une nouvelle résistance aux agents pathogènes. Il pourrait aussi avoir une influence sur la culture des légumes, des fruits et des fourrages.

Vie au sol et sous la terre

Le sol naturel est riche en vie: innombrables sont les micro-organismes, vers, coléoptères, fourmis, cafards, coccinelles et beaucoup d’autres formes de vie sur et sous la terre. Les conséquences pour les sols de l’utilisation croissante de médicaments dans les élevages n’ont encore été que peu étudiées. Ce qui est certain, c’est que les antibiotiques ainsi répandus (perturbant la vie: anti-bio-tique) n’exercent pas une action bienfaisante sur la vie souterraine. Les bactéries sont les groupes dominants de micro-organismes vivant dans la terre. On estime leur nombre de 106 à 109 de bactéries par gramme[5]. Ces micro-organismes sont directement affectés par les antibiotiques transportés. En outre, la grande quantité de matières fécales animales alimente la vie de ces êtres vivants qui ont besoin d’absorber beaucoup d’azote, ce qui se fait au détriment de beaucoup d’autres pour l’entretien de la vie souterraine. Cela entraîne une rupture de l’équilibre écologique dans la terre. La diversité des formes de vie est par conséquent mise en danger tant sur que sous la terre. Les paysans qui n’ont plus employé de matières fécales animales comme fertilisants depuis plusieurs années ont constaté que leurs champs cultivés attiraient moins de parasites. Cela peut, d’un côté, être dû à l’absence d’odeurs nauséabondes, mais d’un autre côté peut aussi être dû à une diversité plus grande des micro-organismes[6].

Mythes et contraintes

La remise en question des engrais animaux dans l’agriculture est souvent considérée comme une hérésie. Jusqu’à maintenant, on a toujours prétendu que leur utilisation faisait partie intégrante du cycle naturel dans la chaîne alimentaire de vie. On nourrit les animaux avec du fourrage ayant été fertilisé avec les excréments de ces mêmes animaux. Cette présentation idyllique est encore aussi celle de l’agriculture biologique. Il faut, toutefois, tenir compte des désavantages mentionnés ci-dessus. Pour les producteurs de viande, il est indispensable de maintenir le mythe du cycle naturel. Si la possibilité de déverser les matières fécales animales en provenance des fabriques d’animaux sur les cultures agricoles était remise en question et interdite, les éleveurs auraient à faire face à un scénario-catastrophe. Une forte pression est exercée à cette fin pour conserver cette pratique. Et il est un fait qu’à l’heure actuelle, il est rare de pouvoir dissocier l’agriculture en général de l’odeur nauséabonde des matières fécales sur les champs cultivés.

Conclusion

Malgré que la fertilisation par matières fécales animales et autres substances animales n’est généralement pas la bienvenue, les aliments ainsi produits ne sont pas fondamentalement rejetés par les végétariens ni par la plupart des vegans. Il est, en dernière analyse, très difficile de refuser des aliments ainsi produits. Il est toutefois intéressant que les personnes qui achètent une partie de leurs légumes directement auprès de paysans qui pratiquent une culture purement végétale rapportent que ces produits ont une meilleure saveur. Cela pourrait s’expliquer parce que les sols où ils ont été cultivés ont été moins fertilisés et que ces produits ont eu ainsi davantage de temps pour croître. Mais tant qu’il sera difficile et coûteux de se nourrir exclusivement de produits cultivés purement végétal, la plupart des végétariens et vegans accepteront (seront forcés d’accepter) un compromis. Pour les agriculteurs un marché nouveau leur est toutefois ouvert même si, à ce jour, il n’est pas encore la règle. Une discussion sur le thème de l’emploi d’engrais animal dans l’agriculture constitue un premier pas en direction d’une agriculture respectueuse de la nature et qui protège vraiment l’environnement.

Note: Les références citées sont en allemand, l’article ayant été traduit depuis cette langue.

Renato Pichler

1 www.admin.ch/ch/d/sr/916_171_1/app6.html
2 Eine Ausnahme bildet in der Schweiz der «Bliib Gsund»-Natur-Versand mit seinem Online-Shop: www.bliib-gsund-versand.ch und in Deutschland: www.lebegesund.de
3 90% der Schweizer Kälber erhalten Antibiotika
4 Neue Zürcher Zeitung, Forschung und Technik, 28.2.2001: Antibiotika allüberall
5 www.bvl.bund.de/pflanzenschutz/FolSerie/BeglText6.pdf
6 Bioveganer Landbau

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