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Utilisation d'antibiotiques dans le secteur de l'élevage

En Suisse, plus de 22 tonnes d'antibiotiques ont été administrées à des animaux en 2021¹ – y compris à des animaux en bonne santé. Cela correspond à plus de 21 millions de traitements aux antibiotiques. En effet, en Suisse aussi, les conditions d'élevage des animaux de rente sont si désolantes qu'il est nécessaire de leur administrer régulièrement des antibiotiques.

Malgré l'objectif de réduire l'utilisation d'antibiotiques dans l'élevage d'animaux de rente pour éviter la résistance aux antibiotiques, le nombre de traitements a augmenté de 20,3 % l'année dernière. À l'exception des porcs, toutes les espèces animales ont subi davantage de traitements que l'année précédente. Les volailles à elles seules ont comptabilisé le chiffre record de 11,9 millions de traitements, ce qui représente une augmentation de 35,6 % par rapport à 2020. Proportionnellement au nombre d'individus, les vaches laitières ont été de loin les plus traitées, avec en moyenne 720 traitements pour 1000 animaux. Cela s'explique principalement par les infections des mamelles et les problèmes de mise-bas et de post-partum, conséquences fréquentes du surmenage des vaches. 

Les antibiotiques comme procédure standard

Les antibiotiques sont utilisés non seulement en cas de nécessité, mais aussi à titre préventif : âgés de quelques semaines seulement, les petits veaux reçoivent déjà une dose d'antibiotiques correspondant au standard de l'élevage. D'après Beat Mühlethaler, ancien gérant de l'organisation d'élevage de veaux Univo, il n'y aurait pas d'autre alternative, en particulier dans les grandes exploitations destinées à l'engraissage des veaux. En effet, le risque de contamination par différents microbes est extrêmement élevé dans ce type d'élevage, où plus de cent animaux sont agglutinés dans un espace restreint. Il n'est plus possible de repérer les animaux malades individuellement. Par conséquent, tout le troupeau est traité à titre prophylactique. Pour ce faire, des antibiotiques sont ajoutés pendant 10 jours au lait en poudre qui sert de nourriture quotidienne aux veaux. Cette cure est ensuite effectuée deux à trois fois supplémentaires à 14 jours d'intervalle.

80 millions de litres de lait inutilisables chaque année

Même dans les fermes ordinaires, l'utilisation d'antibiotiques est à l'ordre du jour. Chez les vaches laitières, des maladies inflammatoires telles que les inflammations du pis ou de légères blessures sont si fréquentes que les paysans n'appellent plus le vétérinaire lorsqu'ils y sont confrontés : ils préfèrent conserver des antibiotiques en réserve afin de les administrer eux-mêmes. Selon les résultats d'une étude, le fait que les agriculteurs traitent les mamelles de leurs vaches laitières avec des antibiotiques est plus fréquent en Suisse que dans le reste de l'Europe, et ce depuis des années.² Ainsi, les vaches suisses se voient administrer des antibiotiques presque chaque année pour soigner leurs mamelles – trois fois plus souvent que les vaches autrichiennes, 18 fois plus que les vaches danoises et 90 fois plus que les vaches norvégiennes.³

Interdiction d'administrer des antibiotiques

Si l'on y regarde de plus près, ces pratiques vont à l'encontre de la loi sur la protection des animaux. C'est aussi l'avis de Regula Vogel, vétérinaire cantonale zurichoise :

Toute forme d'élevage qui nécessite d'administrer continuellement des antibiotiques à titre préventif est contraire à la loi sur la protection des animaux.

Cependant, il est difficile, voire impossible, de lutter contre l'utilisation d'antibiotiques dans l'agriculture. En effet, le traitement par antibiotiques est profitable aussi bien pour les vétérinaires que pour les agriculteurs. Dans le cadre de la révision de la loi sur les produits thérapeutiques, l'Office fédéral de la santé publique a proposé de limiter l'usage vétérinaire d'antibiotiques. Toutefois, la consultation a montré que cette proposition était fortement controversée. Les représentants du secteur de l'agriculture au Parlement s'y sont notamment opposés en bloc, comme l'a fait savoir Urs Schneeberger de l'OFSP à la télévision suisse.

Profit ou santé : le choix est fait

La raison pour laquelle les antibiotiques sont utilisés de manière aussi généreuse est claire : la viande doit être bon marché. La viande bio n'a pas bon dos. En 2020, seuls 6,2 % de la viande et du poisson vendus étaient bio. Pour le poulet, ce chiffre ne s'élevait qu'à 2,8 %. C'est pourquoi il ne vaut pas la peine pour les producteurs de viande d'investir trop d'espace, de temps et de travail pour leurs animaux. Au final, ce sont les animaux qui en paient le prix en devant vivre dans de telles conditions. Mais il est d'ores et déjà prévisible que cette stratégie finira par se retourner contre l'être humain. En effet, en basant notre alimentation sur des produits animaux contenant des bactéries résistantes aux antibiotiques, il va de soi que ces agents pathogènes se propagent de plus en plus chez nous aussi. Et pour cause, en Suisse, plusieurs milliers de patients souffrent d'infections qui ne peuvent plus être traitées par des antibiotiques à cause de microbes résistants.

  1. SI ABV 2021, Prescriptions d’antibiotiques chez les animaux de rente en Suisse 2021, 05.12.2022
  2. Schweizer Bauern spritzen rekordmässige Antibiotika, (Les paysans suisses administrent des quantités record d'antibiotiques), Beobachter, 25.10.2018 (article non traduit)
  3. Antibiotikaspritzen im Kuhstall: 80 Millionen Liter Milch pro Jahr unbrauchbar (Administration d'antibiotiques dans les étables : 80 millions de litres de lait inutilisables par année), Ktipp, 19.04.2022 (article non traduit)
  4. Chiffres du marché bio, Office fédéral de l'agriculture OFAG, 20.03.2020
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