En 2005, la consommation de viande de boeuf, de porc ou de volaille en Allemagne restait en travers de la gorge. Presque chaque jour, la population entendait parler d'un nouveau scandale de viande pourrie.
Les scandales de viande et les épidémies animales ont fait la une des journaux ces derniers mois. Les rapports font état de valeurs limite largement dépassées pour le poisson, les bactéries dans les oeufs, les déchets d'abattoir (éliminés p. ex. sous forme de gélatine dans les haribos) et de viande pourrie déclarée comme viande fraîche. En outre, les contrôles des instances officielles sont un échec.
Déchets d'abattoir
Le 13 octobre 2005, le journal Spiegel a publié un article de reportage expliquant que, lors d'une razzia dans une entreprise en Bavière, les contrôleurs avaient trouvé des déchets d'abattoir dans un entrepôt frigorifique pour aliments. Ces déchets avaient été vendus dans toute l'Europe. Or, cette nouvelle n'était que la pointe de l'iceberg. En réalité, ce qui se passe avec les produits secondaires d'abattage reste souvent dans l'obscurité sans être compréhensible, comme le montre le rapport suivant : « Selon les examens du ministère public de Memmingen et des services de recherche en douane de Lindau, une entreprise de Deggendorf (Allemagne) a distribué dans toute l'Europe jusqu'à 2000 tonnes de déchêts d'abattoir (de porc et de volaille) impropres à la consommation humaine. »
(Die Welt, 14 octobre 2005)
Viande bon marché
Les réactions des supermarchés face à la demande progressive de viande de plus en plus bon marché sont divergentes. De fait, deux marchés réels à Hanovre (Allemagne) ont reconditionné d'anciens emballages de viande et leur ont attribué une nouvelle date de péremption afin de remettre sur le marché de la vieille viande avariée. (NDR)
Lebensmittel & Ernährung (LME) a fait état d'un scandale encore plus important : « Dans toute l'Allemagne, le ministre de la santé de la Sarre, Josef Hecken, et la chaîne de distribution Kaufland mettent en garde contre la consommation de viande hachée avec une date de consommation fixée au 21 janvier. Selon les informations de l'entreprise, les produits à base de viande hachée vendus sous le nom de Purland contiennent des bactéries coli. L'entreprise a déjà initié le rappel de lots encore existants dans la Sarre. Néanmoins, de nombreux lots circulent déjà dans le commerce de la Sarre. Les consommateurs sont invités à consulter un médecin immédiatement dès l'apparition des premiers symptômes, tels que nausées et vomissements. La façon dont la bactérie coli a pénétré dans le bœuf et le porc hachés mélangés est toujours à l'étude. »
Les éleveurs et les abattoirs aussi sont concernés par la lutte des prix au comptoir : « Les collaborateurs de l'office de surveillance vétérinaire et alimentaire de Mönchengladbach ont saisi dans une entreprise de gros 400 kg de viande congelée pas suffisamment étiquetée. La date de péremption des marchandises, qui étaient des viandes de boeuf, de porc et de volaille, ne pouvait plus être déterminée.» (LME)
Viande avariée
Outre le poulet, le porc et le bœuf, la viande de gibier n'est pas épargnée par les scandales. Un nouveau cas de viande avariée a vu le jour à Passau début janvier. « Dès que la police criminelle de Passau a informé le bureau vétérinaire responsable de graves violations de la loi dans l'entreprise Berger Wild GmbH, une enquête sur les conditions d'hygiène dans l'entreprise a été ordonnée. L'enquête a révélé des conditions d'hygiène horripilantes : salissure considérable des équipements de travail, des sols, des portes et des poignées de porte avec du sang, des restes de viande et de plumes ; formation de moisissures sur les plafonds et les murs ; contamination de morceaux de viande déjà abattus ; corps de viande sans marques de salubrité jugés impropres à la consommation. » (LME)
Nul ne sait depuis combien de temps cette viande, sans aucun doute nocive pour la santé, est restée en vente sans être détectée. Est-ce une coïncidence que plus de 300 cas de salmonellose aient été enregistrés en Allemagne depuis janvier ?
Poisson pourri
Si tous les rapports sur la viande avariée vous ont donné envie de passer au poisson, là n'est pas la solution : les inspecteurs des denrées alimentaires ont également trouvé sur de nombreux marchés du poisson impropre à la consommation. Par exemple, lors d'une inspection dans les locaux du marché de gros de Cologne, il s'est avéré que les marchandises d'une entreprise de vente au détail n'étaient ni suffisamment réfrigérées ni correctement emballées. L'ensemble de l'étalage a dû être détruit. (Kölner Stadtanzeiger)
« Par mesure de précaution, plus de 136 échantillons de viande de volaille et de saumon ont été prélevés dans la Sarre ces derniers jours afin d'examiner de manière critique la qualité des marchandises importées ou produites en Sarre et sur le marché de la Sarre. Cinq des 53 échantillons de saumon n'étaient plus propres à la consommation en raison de déviations bactériennes. » (LME) Cette fois, le consommateur a eu de la chance et les produits incriminés ont été immédiatement retirés du marché et éliminés. Au même moment, la Russie a interdit l'importation de saumon norvégien, car une enquête a révélé que celui-ci contenait respectivement 18 fois et 3,7 fois les niveaux maximaux de plomb et de cadmium autorisés en Russie. (LME)
Quelles conclusions tirer de ces scandales ?
En dehors des droits des animaux et des aspects écologiques et éthiques liés à la consommation de viande, l'impact négatif de ce régime alimentaire sur la santé est mis en lumière. Au vu des gros titres sur la viande contaminée, les consommateurs sont confrontés à un choix : ignorer le problème ou changer leurs habitudes alimentaires !
Après tout, lorsqu'il achète un steak chez le boucher ou au rayon surgelé, le consommateur ordinaire ne peut pas déterminer si la viande est encore comestible ou non – et comme on l'a vu, il vaut mieux se méfier des dates sur les étiquettes.
En guise d'alternative, il peut toutefois opter pour des fruits, des légumes ou encore des céréales. L'un des principaux avantages de ces produits est en effet que, pour déterminer quelle est leur qualité, le consommateur peut se fier à ses propres yeux. L'arbitraire du fabricant n'entre pas en ligne de compte car, après tout, il ne vient à l'idée de personne de changer la date de péremption sur l'étiquette d'une pomme. Tout le monde peut voir si le produit correspond à la qualité promise, et chacun est libre de décider s'il préfère manger une pomme pourrie ou fraîche. De fait, nos organes sensoriels d'êtres humains nous permettent de déterminer immédiatement lorsqu'un fruit ou un légume est pourri, ce qui nous protège en conséquence. Dans le cas des salmonelles, des bactéries coli et autres agents pathogènes qui se multiplient dans les viandes avariées, nos cinq sens ne nous avertissent en aucun cas du danger, ce qui laisse supposer que les humains ne sont pas destinés à manger de la viande. Le consommateur dépend ainsi aveuglément des mesures effectuées par les inspecteurs et des informations figurant sur l'étiquette.
Les gros titres mettent en avant le problème de la consommation de viande en lien avec les stratégies low-cost des détaillants. Mais même si le sujet de la viande avariée sera bientôt étouffé par un autre scandale, l'exploitation des animaux dans les abattoirs, l'appât du gain dans le commerce et la demande en matière de nourriture moins chère demeurent. Il existera toujours un risque de trouver de la viande avariée dans les magasins. Le seul moyen de se protéger à 100% contre les dommages indirects de cette commercialisation à but lucratif au détriment de la santé et des animaux est de renoncer à consommer de la viande. Car dans les circonstances actuelles du marché de la viande, le prochain scandale est inévitable.
Un expert du secteur rapporte :
Dans l'industrie, la viande de gibier en provenance de l'étranger est souvent redéclarée et vendue comme un produit local. Un enquêteur chevronné a rapporté qu'il avait, par exemple, condamné des marchands de gibier frauduleux qui avaient importé des centaines de tonnes de viande d'antilope et l'avaient redéclarée comme du gibier allemand. Gardons à l'esprit que le gibier est au menu dans presque tous les restaurants. Même les importations en provenance d'Europe de l'Est ne suffisent plus à répondre à la demande. Avec la technologie moderne, il est aujourd'hui beaucoup plus facile que par le passé de déclarer une viande d'Afrique comme un gibier local. À l'aide d'une photocopieuse, les papiers peuvent être si bien falsifiés que même un expert aura du mal à le déterminer. C'est deux poids deux mesures lorsqu'on sait que les voyageurs doivent faire fouiller leurs bagages pour se protéger contre la propagation de la grippe aviaire. « De toute évidence, personne ne veut admettre que d'énormes quantités de porc, de volaille et de gibier en provenance de Chine sont importées et mises en vente illégalement », a souligné l'enquêteur. Des quantités substantielles de viande mal déclarée provenant d'Amérique du Sud, comme le lièvre sauvage d'Argentine, sont également commercialisées. Jusqu'à présent, la lutte contre les fraudeurs ne va pas suffisamment loin. On ne fait qu'« égratigner la surface ».
Seule une petite partie du gibier consommé en Allemagne est une viande locale. « 99 % des animaux livrés aux fermes à gibier pour être transformés sont surgelés », rapporte un initié. Le fait que cette viande soit décongelée avant d'être transformée n'a rien d'étonnant pour l'entreprise Berger Wild. « Quiconque conteste ce processus et demande à interdire que de la viande surgelée soit vendue comme fraîche peut fermer toutes les fermes à gibier. »
Extrait du journal Augsburger Allgemeine